Scénario :
Zone d’Aliénation
«C’est comme si le temps s’était arrêté. La ville est comme figée, rien n’a changé depuis l’accident. Les voitures sont encore garées dans les rues, les portes des maisons sont restées ouvertes depuis que les habitants en sont partis avec empressement. Les seuls éléments notables sont les jardins, envahis de plantes sauvages et toute la flore qui s’est développée dans les rues, entre les pavés, dans les maisons. Elles ont envahi progressivement la ville, comme pour mieux en chasser les anciens occupants. Mais je suis resté, tenace, et je peux maintenant témoigner de l’apocalypse.
L’alerte a retenti dans la nuit et personne ne savait ce qu’elle signifiait à ce moment-là. Ce n’était pas l’alerte habituelle qui signale un feu de forêt. Celle ci était plus aigüe, plus intense. C’est comme si on vous perçait les tympans depuis l’intérieur, comme pour prévenir une douleur qui venait de l’intérieur. Tout le monde est sorti de chez soi, en cherchant une personne qui saurait ce que cela signifiait. Personne ne comprenait.
Après de longues minutes, un véhicule de secours est arrivé et un homme en combinaison jaune en est sorti avec un mégaphone. Il a demandé à tout le monde d’évacuer le quartier par des bus qui devaient arriver d’un instant à l’autre. Alors que tout le monde voulait savoir les raisons de ces directives, une secousse s’est fait sentir. Je n’ai rien vu venir. Personne n’a su ce qui se passait. Un souffle a balayé la rue avec une violence sans nom. Je fus projeté en arrière et je perdis connaissance.
Lorsque je revins à moi, la rue était déserte. Tout était encore en place. Je ne savais combien de temps j’étais resté inconscient mais une chose était sûre : la ville avait bien été évacuée. Je fus saisi d’un mouvement de panique incontrôlable. Que s’était-il passé ? Pourquoi étais-je le seul à être resté ? Les questions se bousculaient dans ma tête. J’étais seul, abandonné à moi-même, dans un lieu que je connaissais pourtant bien mais que je ne reconnaissais plus. Les voix des passants, les bruits des voitures, les cris des enfants, tout s’était arrêté.
Il ne restait que le silence. Le silence parfois interrompu par le bruit du vent dans les arbres. Ce silence m’apaisait. Jamais je ne m’étais senti aussi bien. C’est à cet instant que j’ai arrêté de chercher à comprendre ce qui était arrivé et que j’ai embrassé ma réalité tel qu’elle. C’était un cadeau que j’acceptais maintenant volontiers.
Je compris plus tard que je venais de vivre un des pires accidents nucléaires enregistré à ce jour. Toute la population aux alentours de la centrale avait été évacuée. De nombreuses personnes avaient succombé, par l’explosion mais surtout par le mouvement de panique qui l’a suivi.
Je reste maintenant seul dans cette ville fantôme qui m’appartient et savoure le plaisir que m’apporte cette solitude. Je me réjouis d’autant plus de mon sors, ayant échappé à toute cette folie humaine. Pour toujours.»
Extrait du journal du Patient n°42; Hôpital psychiatrique Narrentum.
END:
Pascale Lacroix /Helenna Luz /Vincent Marchaud.